Quelques observations sur le bassin de talents mondial en IA en 2019

avril 12, 2019 9:48 am Publié par Marilyn Remillard Catégorisé dans:

Le rapport sur l’écosystème canadien de l’IA de l’an dernier visait à tester notre hypothèse selon laquelle l’écosystème canadien de l’IA est plus vaste que ce que l’on prétend généralement. Depuis, nous avons constaté une augmentation de 28 % du nombre d’entreprises en démarrage actives dans le domaine de l’IA au Canada. Avec la mise à jour du rapport, nous souhaitons continuer de faire connaître l’activité florissante de l’écosystème canadien de l’IA, mais de manière un peu plus détaillée.

Ce rapport est le résultat d’une collaboration à grande échelle. La générosité de Consider Canada, Real Ventures, Investir au Canada, et Innovation, Sciences et Développement économique Canada (ISDE) nous a permis recueillir un énorme volume de données. Nous avons aussi agrégé des données provenant de Crunchbase, d’AngelList, de CB Insights, de Tracxn et de PitchBook. Il n’y avait plus qu’à nettoyer, organiser et analyser cette mine d’or de données pour repérer les tendances, et les partager avec le reste du monde. Notre base de données sert également à alimenter le répertoire de Canada.ai, que vous pouvez consulter pour trouver les startups canadiennes en IA.

Nous espérons montrer que le travail de nombreux acteurs dévoués porte ses fruits, et visons à donner plus de visibilité à l’écosystème dans son ensemble.

Quelques absents…

Certaines organisations ne figurent pas sur les cartes – les laboratoires de recherche en particulier – faute d’avoir trouvé leur logo. Si vous ne voyez pas le logo, remplissez ce formulaire.


Un écosystème en croissance

Nous avons fait plusieurs découvertes sur l’écosystème canadien dans la préparation de ce rapport. Le nombre d’entreprise dans le domaine de l’IA (en démarrage et établies) est en plein essor, de même que les ententes et le financement pour les appuyer. e bassin de talents se porte toujours bien, mais de nouveaux défis se dressent à l’horizon.

Entreprises en démarrage et établies

De 2017 à 2018, il y a eu une augmentation de 28 % du nombre d’entreprises en démarrage actives dans le domaine de l’IA, pour un total d’environ 650 entreprises réparties dans les grands pôles de croissance.

Le nombre de laboratoires ouverts par de grandes sociétés internationales dans les villes canadiennes a également subi une forte hausse. Des entreprises phares comme Google, Uber et Facebook ont contribué au renforcement des communautés de chercheurs déjà très actives en formant des groupes de recherche dans les principaux pôles de croissance en IA (Montréal, Toronto, Vancouver).

La dernière année a été particulièrement marquante à cet égard. Alors que nous avions recensé environ 20 grandes sociétés internationales dans l’écosystème au début de l’année 2017, nous estimons que ce nombre est passé à près de 50 cette année.

Investissements

Le nombre d’ententes liées à l’IA a augmenté de 49 % par année en moyenne au cours des cinq dernières années (en date du premier trimestre de 2018).

La nature de ces ententes évolue. Les ententes avec les investisseurs de capital risque et les investisseurs providentiels ne représentent plus que 36 % des ententes aujourd’hui, contre 55 % en 2013. Entre-temps, les ententes avec les grandes entreprises ont doublé, et celles avec les accélérateurs et les incubateurs ont triplé.

Les investisseurs canadiens signent la plupart de ces ententes (62 %), tandis que les investisseurs internationaux ont conservé une part constante d’environ 40 % au cours des cinq dernières années.

Le financement continu des investisseurs locaux alimente la communauté d’entreprises en démarrage et renforce la crédibilité de l’écosystème, qui est devenu une cible attrayante pour les investisseurs internationaux.. Cela est mis en évidence par les multiples ententes cumulant plus de 100 millions de dollars qui ont été conclues dans les dernières années.

En outre, le nombre d’acquisitions a augmenté en moyenne de 50 % par année au cours des cinq dernières années. Les acteurs internationaux (pour la plupart issus de la Silicon Valley) sont principalement à l’origine de ces transactions.

Cette tendance en matière d’acquisition et d’investissements internationaux nous indique que les entreprises en démarrage continuent d’attirer l’attention à l’échelle mondiale et confirme la thèse que nous avions émise l’an passé : l’écosystème est en train de passer d’une phase d’activation à une phase de mondialisation (ou d’expansion des grands pôles).

Financement

L’un des plus grands facteurs de différenciation de l’écosystème canadien de l’IA par rapport aux autres écosystèmes semblables, comme celui de la France, de l’Angleterre ou de la côte est des États-Unis (la Silicon Valley est dans une catégorie à part), est le financement public continu de l’innovation, qui est nécessaire au bon fonctionnement de l’écosystème.

C’est ce qui explique que les avancées majeures dans le domaine de l’apprentissage machine aient été réalisées par des universités canadiennes et que les meilleurs laboratoires de recherche au monde se trouvent au Canada.s

Vu la récente annonce d’un financement de la recherche scientifique de 4 milliards de dollars sur quelques années, il n’y a aucun doute que les laboratoires canadiens d’IA continueront de produire de la recherche de haut niveau. Ces recherches sont porteuses d’innovation, ce qui est crucial pour les marchés émergents du secteur de l’IA.

Bassin de talents

Si l’écosystème canadien de l’IA possède l’un des bassins de talents les plus importants au monde, c’est grâce au soutien incessant apporté aux laboratoires de recherche publics. Comparativement aux autres écosystèmes nationaux, le Canada héberge la troisième population d’experts au monde.

Un nombre grandissant d’accélérateurs et d’incubateurs directement affiliés à des universités a incité de jeunes talents prometteurs à démarrer des entreprises sur place. Citons l’exemple éloquent de Waterloo, où 35 % des entreprises en démarrage sont issues de ces collaborations. Edmonton, qui a suivi une trajectoire semblable, est la ville où la croissance du nombre d’entreprises en démarrage a été la plus importante dans la dernière année.

En d’autres mots, la collaboration entre les universités (vecteurs de talent et d’innovation) et les entreprises crée un écosystème en santé, capable de résister à la force d’aimantation de la Silicon Valley.

Bien que la communication entre le monde universitaire et le monde des affaires repose sur un fondement solide et que la fuite des cerveaux s’en trouve enrayée, d’autres défis de taille exercent une pression sur le bassin de talents.

Même si le nombre d’entreprises en démarrage (et le nombre moyen d’employés) semble croître à un rythme soutenable, les grandes sociétés internationales qui s’imposent dans les grands pôles convoitent les mêmes talents que les autres, contribuant à entretenir la pénurie de talents.

En conclusion

Ces observations, particulièrement lorsqu’elles sont considérées sous l’angle de la croissance soudaine du nombre d’acteurs internationaux au Canada, nous indiquent que l’écosystème canadien de l’IA ne constitue pas un « bassin de ressources naturelles » pour les écosystèmes plus imposants. Rappelons que la résistance au « pillage des ressources » a toujours été le plus grand défi de l’écosystème canadien.

La capacité de l’écosystème de résister à la fuite historique des cerveaux s’intensifie à mesure que les entreprises en démarrage des grands pôles en IA gagnent en maturité et en stabilité. Par contre, ce que nous ignorons, c’est la façon dont l’écosystème réagira à la forte pression exercée par les grandes sociétés sur le bassin de talents local. Voilà le défi qui nous attend cette année.

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Source : jfgagne, blog, avril 2019